Lettre au président Emmanuel Macron

Lettre manuscrite

Monsieur Emmanuel MACRON
Président de la République.
Palais de l’Elysée
55 Rue du Faubourg Saint-Honoré, 75008 Paris

Paris/ Lille/ Montpellier, le 5 février 2025;


Monsieur le président,


La réforme de l’apprentissage est une des réussites incontestables de vos mandats. Si la
période politique actuelle est traversée, pour de nombreuses raisons, de tensions et
parfois de fractures, les faits sont incontestables : votre action et celle de vos équipes ont
réussi ce que, depuis des années, personne n’avait eu le courage politique d’engager.
Là où se succédaient des déclarations d’intention sans suite qui laissaient l’alternance et
l’apprentissage dans un marasme « ni-ni » sans véritable élan, notre pays a crée une
culture de l’apprentissage et ouvert une voie -du CAP aux bac plus 5 ou 6 – qui concerne
désormais près d’un million d’apprenants.


Aujourd’hui, la clarification des dispositifs (l’apprentissage a clairement pris le dessus, ce
qui était sans doute initialement prévu mais a été fait sans heurts), l’existence d’une
gouvernance, les aides aux entreprises, l’élargissement de l’éventail des niveaux, entre
autres, ont permis:


-le développement d’une offre complète et d’un maillage régional,
-la création (encore insuffisante peut-être) d’une vraie culture de l’alternance permettant
des parcours complets jusqu’au niveau 7 et facilitant l’insertion des jeunes sur le marché
du travail
-une réactivité dans la construction/ le renouvellement des titres et des formations au
regard des évolutions professionnelles
-un désengorgement des structures de type universitaire qui ne pouvaient accueillir
tous les jeunes, notamment ceux issus de filières techniques -voire pro- régulièrement
écartés ou rapidement en échec
-une véritable démocratisation des formations, en particulier supérieures, offrant des
possibilités de parcours complets à de nombreux jeunes de milieux modestes.
Ces acquis, aujourd’hui largement documentés, sont le résultat d’un courage politique et
d’une vision ouverte.


On peut, certes, et d’aucuns s’y consacrent, contester, l’intérêt d’un développement réel
de l’apprentissage comme de l’investissement qui a été fait à son service.
La plupart du temps-ce qui est, bien sûr, admissible en démocratie-les raisons de ces
critiques tiennent plus de l’idéologie que du pragmatisme.


Il n’en demeure pas moins
-qu’il y a eu un rapprochement inédit de la formation et de l’entreprise,
-que l’alternance reste très majoritairement populaire parmi les jeunes (lesquels,
majoritairement, l’incluent dans leurs réflexions d’orientation même lorsqu’ils n’en font pas
le choix final)
-et qu’il y a aujourd’hui, avec l’apprentissage, tant en école d’ingénieur qu’en cinquième
année dans les formations tertiaires, beaucoup plus de jeunes fils d’employés et
d’ouvriers qu’il n’y en a dans les M2 d’universités.

Toutefois, Monsieur le Président, ce courrier-que nous aurions pu faire signer, au delà de
nos responsables d’OF/CFA et de nos salariés, par un grand nombre de jeunes-ne
consiste pas uniquement à vous remercier de ces avancées.
En effet nous sommes aujourd’hui, inquiets sur des points précis comme sur les évolutions
qui semblent s’avancer.


D’abord, nos OF/CFA ont un vrai besoin de stabilité. Comment, en effet, investir
humainement, économiquement lorsque les conditions d’exercice changent sans cesse ?
Pour rester, par exemple, dans une actualité immédiate, le décret annoncé pour le début
d’année sur les aides à l’embauche, nouvelle version est toujours en attente. Derrière
cela, il y a des milliers de jeunes -et d’équipes de conseillers- qui commencent leurs
recherches sans savoir quand ou vers quoi on se dirige. La rentée de septembre serait-
elle déjà compromise ?


Plus globalement, l’apprentissage pourrait, si l’on y prête attention, entrer dans un phase
de recul à laquelle personne ne gagnerait.
Si demain,
-les entreprises touchent moins de prime à l’embauche et si on leur demande des restes à
charge jusqu’à 20% du NPEC de France Compétences,
-si les niveaux de prise en charge (dont le système d’attribution est d’ailleurs très injuste)
baissent encore,
-si lesOF/CFA à taille humaine sont mis en difficulté, alors que ce sont eux qui ré-
investissent dans notre pays (à la différence des fonds de pension étrangers) et qui offrent
un maillage important pour les jeunes et familles,


Alors l’effort national consenti pour créer une -encore fragile -voie d’alternance allant des
premiers niveaux de formation à l’excellence, risque d’être mis à mal.
Cet effort, Monsieur le Président, vous l’avez voulu, mis en œuvre avec énergie et,
nonobstant les différences de vision, il est utile pour un pays qui a besoin de soutenir
l’emploi, de démocratiser les études supérieures comme de nourrir les métiers en tension,
d’offrir une voie pédagogique différente à tous les jeunes qui en ont besoin.
Cet effort, nous voulons en préserver l’acquis (aujourd’hui plébiscité par les jeunes) et
contribuer à l’améliorer ensemble.


Nous sommes certains que le sujet vous importe car vous êtes celui qui a su ouvrir les
portes et sortir l’apprentissage de son long sommeil.
Nous souhaitons, au nom de milliers d’apprenants d’aujourd’hui et de demain, de nos
salariés, de nos entreprises partenaires, que les décisions potentiellement lourdes de
conséquences, soient mûrement soupesées.


Pour cela, nous en appelons à votre vigilance et à vos arbitrages.
C’est pourquoi, Monsieur le président, nous sollicitons un rendez-vous avec vous et/ou les
membres de votre équipe pour évoquer le présent et l’avenir immédiat.


Dans l’attente, veuillez croire, Monsieur Le Président, à l’expression de notre haute
considération.


Pour la CSOFA, ses porte-paroles.

Partager l’article :

Facebook
LinkedIn
X

NEWSLETTER

Adhérer à la CSOFA